Autrefois, pour les femmes, le jour de la lessive était un
événement important : cette opération n'avait lieu, en général,
qu'une ou deux fois par an. On lavait le linge accumulé depuis
plusieurs mois, ce qui supposait plus d'une journée entière d'un
travail harassant. Cette rareté des lavages obligeait les
maisonnées à emplir leurs armoires d'impressionnantes piles de
linge. Sans aller jusqu'à compter le nombre de draps, de torchons
ou de chemises, chacun se souvient des trousseaux d'antan !
Au jour voulu du
printemps ou de l'automne, les femmes se mettaient au travail en
s'entraidant naturellement. Certaines faisaient appel à une
lavandière ou lessivière. Métier particulièrement pénible, car
elle vivait dans la buée, les pieds mouillés, les mains fripées
et déformées par les rhumatismes. Après avoir coulé la lessive
dans la buanderie, opération longue et délicate, venait alors le
rinçage au lavoir. Des lavoirs étaient aménagés le long de
certaines rivières où les femmes se rendaient en cortèges pour
rincer les lessives familiales. Dans certains villages éloignés de
la vallée, le rinçage s'effectuait à la mare communale ou à la
fontaine.
A partir de
1860, les communes firent construire des lavoirs couverts, dont
certains plus élaborés avaient un plancher mobile qui pouvait être
réglé en hauteur en fonction du niveau de l'eau. Ce travail était
souvent confié au garde champêtre.
L'animation
commençait tôt le matin. Les paniers de linge mouillé étaient
descendus de la brouette ou de la charrette. On déchargeait aussi
le seau et le baquet dans lequel on faisait dissoudre la "tototte"
de bleu (boule de bleu emmaillotée de chiffons). La lessivière
attendait parfois que soit libre sa place préférée. A la mare,
elle convoitait l'endroit où l'eau était la plus claire, près de
l'oeillet (arrivée de l'eau).
Elle se mettait
alors au travail: d'un geste preste, elle lavait la pierre,
trempait son linge dans l'eau claire, le ressortait, le tordait,
le battait à l'aide de son battoir pour en exprimer l'eau
savonneuse, puis recommençait jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de
traces blanchâtres dans l'eau...
La lessive
terminée, il fallait remonter les brouettes chargées de linge. Il
séchait au grand air, parfois étendu sur l'herbe, s'imprégnant du
parfum subtil de l'air environnant. Voilà pourquoi les lourdes
armoires de nos grand-mères fleuraient bon mille senteurs
champêtres.
C'est avec émotion que les Anciens évoquent la
lessive "du trousseau de la mariée". On se pressait au lavoir pour
l'admirer. Certains se souviennent aussi de la charrette enrubannée
ou décorée de fleurs pour la circonstance.
Source de la commune Pierres du
Canton de Vassy |